- 16 Août 2023 - Planétarium : Expérience
Pendant longtemps, en Occident, on ne croyait pas que les météorites tombaient du ciel. Il aura fallu un scientifique audacieux et une chute dans la ville de L'Aigle en 1803 pour changer notre perception de ces objets célestes.
Pierre de tonnerre
Les chutes de météorites ont toujours intrigué les humains. Certains y voyaient de mauvais présages, d'autres des signes divins. Malgré les nombreux témoignages, les savants occidentaux ne croyaient pas les paysans qui attestaient avoir vu tomber des pierres du ciel. Au 18e siècle, on a même classé ces pierres dans la catégorie des « pierres de tonnerre ». Ces objets regroupaient un grand nombre d'objets hétéroclites qui étaient exhibés dans les cabinets de curiosités de l'époque.
L'analyse de Lavoisier
Suite à une chute de pierres dans la commune de Lucé en France en 1768, l'Académie royale des sciences demande à trois chimistes, dont le futur célèbre Antoine Lavoisier, d'analyser ces pierres.
Les méthodes d'analyse de l'époque étaient cependant rudimentaires. L'observation à la loupe va montrer la présence de grains de métal que les chimistes confondent pour de la pyrite. En vérité, ce sont des morceaux de fer et de nickel, un minerai alors inconnu. Le rapport d'analyse, présenté par Lavoisier, va conclure que les pierres ne sont pas tombées du ciel, mais qu'il s'agit plutôt d'un grès riche en pyrite qui a été frappée par la foudre.
L'audace de Chladni
En avril 1794, le savant allemand Ernst Chladni publie un livre dans lequel il expose ses observations sur plusieurs types de roches et des chutes de pierres. Il avance que des pierres, venues de l'espace, peuvent tomber du ciel et former des boules de feu en traversant l'atmosphère terrestre.
Il va même plus loin en prétendant que ces pierres sont des fragments d'une planète qui ne s'est pas formée.
Ces hypothèses très audacieuses, et en avance sur leur temps, sont plutôt mal reçues par les savants de l'époque.
La chute de L'Aigle
Les idées de Chladni vont cependant être confirmées par la chute d'une météorite le 26 avril 1803 au-dessus de la ville de L'Aigle, en France. Vers 13 h heure locale, plus de 3000 fragments de pierres se sont abattus sur la région. Les habitants ont entendu deux bruits semblables à des coups de canon, suivis d'un roulement. Des pierres sont ensuite tombées du ciel. Plusieurs ont été effrayés par un tel spectacle.
L'enquête de Biot
Le ministre de l'Intérieur de cette époque veut faire la lumière sur ces événements. Il délègue l'enquête au jeune astronome Jean-Baptiste Biot.
Biot se rend à L'Aigle le 26 juin. En chemin, il interroge tous les voyageurs sur la chute de pierres. Sur place, il explore minutieusement les environs et recueille de nombreux autres témoignages. Il peut ainsi dresser la première carte de dispersion des météorites.
Le rapport historique
Le rapport de Biot est présenté aux membres de l'Institut de France le 18 juillet 1803. Ce document intitulé Relation d'un voyage fait dans le département de l'Orne, pour constater la réalité d'un météore observé à l'Aigle le 6 floréal an 11 est aujourd'hui célèbre.
Il y présente des « preuves morales » de la chute de météorites sous la forme des témoignages provenant d'une grande diversité sociale. Ces témoins n'ont pas d'intérêt à mentir sur les événements.
Biot constate aussi qu'il n'y a pas de fonderie, d'usine, de mine ou de volcan qui pourrait être à l'origine des météorites. Pour Biot, la chute de pierres à L'Aigle en 1803 ne peut s'expliquer qu'en acceptant qu'elles soient tombées du ciel. Il croit cependant que les pierres viennent de la Lune.
La qualité du rapport de Biot va clore définitivement le débat sur l'origine extraterrestre des météorites. À partir de ce moment, ces pierres célestes vont acquérir un statut d'objets d'intérêt scientifique incontestable.