C’est le printemps et vous cherchez des plantes indigènes à ajouter dans votre jardin. Lors d’une visite dans une pépinière, vous apercevez une plante avec une jolie fleur blanche. Qu’elle est belle! En regardant l’étiquette, vous lisez qu’il s’agit de Trillium grandiflorum, le trille blanc. Un doute vous envahit soudainement : n’est-ce pas une espèce vulnérable au Québec? Ne devrait-elle pas être interdite de vente? Si je l’achète, est-ce que je contribue au problème de la cueillette en milieu naturel?
Pour répondre à ces questions, voici quelques explications sur les différentes catégories de plantes en situation précaire au Québec.
Les plantes en péril, ça ne date pas d’hier
Il existe plusieurs listes d’espèces vulnérables ou en voie de disparition à travers le monde, de même qu’au niveau national et provincial. En effet, le Québec a adopté la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables en 1989, mais il a fallu attendre 1993 pour qu’une première liste d’espèces menacées ou vulnérables soit publiée. Depuis, cette liste a été mise à jour selon des données récoltées à même nos écosystèmes.
Au Québec, c’est le Centre de données sur le patrimoine naturel du Québec (CDPNQ) qui s’occupe de mettre à jour les données sur les espèces en situation précaire. Il s’agit d’une base de données à partir de laquelle le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs puise de l’information et génère des listes de vulnérabilité, autrement dit des listes d'espèces menacées dans leurs milieux naturels au Québec. Pour les plantes, celle qui nous intéresse est la Liste des espèces floristiques désignées menacées ou vulnérables ou susceptibles de l’être.
Quel nom! Cette liste, mise à jour en 2020, est composée de plusieurs catégories (plantes, bryophytes, etc.). Elle contient 86 espèces de plantes qui sont désignées menacées ou vulnérables ainsi que 422 espèces susceptibles d’être désignées menacées ou vulnérables dont 235 sont des plantes vasculaires. À noter que les 86 espèces de plantes menacées ou vulnérables sont sous protection légale et ne peuvent être récoltées ou déplacées de leur environnement naturel, sauf exception.
Menacée, vulnérable ou susceptible de l’être
Afin de s’y retrouver, voici une courte explication de chaque catégorie présente dans la liste. Selon la classification du ministère, une espèce floristique menacée est une espèce dont la disparition est appréhendée. Cela veut donc dire que l’espèce est vouée à disparaître de son habitat naturel au Québec si aucune démarche de préservation n'est entreprise. Il s’agit du statut le plus préoccupant qu’une plante peut atteindre. Le ginseng à cinq folioles (Panax quinquefolius) en est un exemple.
Une espèce floristique vulnérable est une espèce qui a une capacité de survie précaire même si sa disparition n’est pas appréhendée. Cela signifie que bien que l’on ne craint pas pour sa disparition en milieu naturel, la survie de certaines populations est incertaine. C’est le cas de l’ail des bois (Allium tricoccum). Il est important de noter que les espèces identifiées dans ces deux catégories ne peuvent pas, selon la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables, être vendues au Québec sous quelque forme que ce soit, incluant des productions en serre ou en pépinière.
En ce qui concerne les espèces floristiques susceptibles d’être désignées menacées ou vulnérables, elles sont sur la liste par mesure préventive. Ces espèces sont sous surveillance et pourraient éventuellement être catégorisées vulnérables si des déclins importants des populations naturelles étaient constatés. Ces espèces peuvent être vendues de manière commerciale. D’ailleurs, certaines sont d’intérêt horticole et leur propagation en pépinière ne cause pas de préjudice aux populations naturelles. Deux exemples de telles espèces seraient le penstémon hirsute (Penstemon hirsutus) et le physostégie de Virginie (Physostegia virginiana).
Enfin, il existe également une quatrième catégorie : les espèces floristiques vulnérables à la récolte, comme la sanguinaire du Canada (Sanguinaria canadensis). Ces espèces subissent une pression, de par la cueillette, pour leur survie en milieu naturel. Cette dernière catégorie est légèrement différente des autres. Ces espèces listées ne sont pas suivies par le CDPNQ, car elles sont relativement fréquentes sur le territoire québécois et ne sont pas en danger immédiat de disparition. Par contre, il est interdit de récolter plus de cinq spécimens de plantes entières ou de participer au commerce de ces plantes récoltées dans des populations sauvages. Donc, il est possible de se les procurer sur le marché pourvu qu’elles soient d’origine horticole.
Pour ou contre l’achat du trille blanc?
Revenons à notre mise en situation du début. Le trille blanc n’est pas classé comme une plante menacée ou vulnérable. Cependant, il est dans la catégorie des plantes vulnérables à la récolte. Si vous le voyez dans une serre ou une pépinière, il est important de vous informer auprès du personnel de sa provenance pour éviter l’achat d’une plante sauvage. Protégeons la flore du Québec en achetant légalement!