- 21 Juillet 2011 - Jardin botanique : Expérience
Biologiste, 2001.
Je regardais la Cour des sens de mes yeux de biologiste. Martin Desrosiers, animateur non-voyant de ce jardin, auprès de moi. La Cour était jeune, moi aussi. Durant plusieurs années, j'avais dirigé au Jardin botanique de Montréal des groupes de camps de jour. Des sujets variés j'en avais abordé, mais presque toujours de mes yeux… Martin m'invitait à voir les plantes autrement… Sans la vue, car comme disait Saint-Exupéry: «L'essentiel est invisible pour les yeux.»
Un bandeau.
Martin me le tendait: «Ici Philippe, tu es invité à toucher et sentir les plantes les yeux fermés.» Curieuse expérience des sens. Et là, pendant un long moment, accompagné de la voix rassurante et profonde de Martin, guidé par ses mains, je me suis attardé à chaque plante de la Cour des sens. Martin est mon maître. Aujourd'hui, en 2011, je tente de recréer ce climat, cette approche nouvelle et inusitée. Les plantes sans la vue, avec odeurs, textures, bruits et saveurs parfois…
Des plantes.
Cette Cour divisée en quatre sections principales: douce, rugueuse, piquante ou collante, ou encore, fruitée, citronnée, épicée ou camphrée. Presque une centaine de rencontres végétales avec l'inespéré et l'inattendu des sens. Expérience en Cour.
Douce ou fruitée, Coups de cœur assurés.
L'Épiaire laineuse fait sensation à tout coup avec le public. Tous les 0 à 100 ans apprécient sa douceur et sa forme d'oreille animale. Le Géranium pomme me rappelle les tartes de mes grands-mères… Nous sommes près de l'entrée de la Cour et déjà, on a les sens éveillés!
Citronnée et rugueuse.
Bienfaisante Verveine citronnelle. Connue pour ses délicieuses tisanes au citron. Avec une pointe de Stévia sucrée, découverte après, au diable les édulcorants de synthèse! Le parfum de cette verveine est présent, sans l'être trop. Et sa texture a un brin de rugosité lorsqu'on caresse la feuille. À découvrir dans la Cour et à cultiver chez soi.
Jacinthe d'eau.
Et d'étonnement. Julien adore animer à l'aide de cette plante. Julien est animateur à la Cour, tout comme Laurent, Stéphanie, Catherine et moi. Nous poursuivons, chacun à notre manière, la quête des sens, une approche végétale. Julien adore nous mettre les mains dans l'eau pour toucher les racines surprenantes de cette Jacinthe. Agréable et drôle.
Épicée.
La Plante curry provoque plusieurs commentaires qui me donnent l'occasion d'expliquer l'origine de quelques épices. En effet, celle-ci n'est pas le curry, mais donne aux mets un parfum de curry. On doit toutefois la retirer après la cuisson. Pour son côté piquant, la Cardère à foulon est, quant à elle, étonnante. Une occasion de faire de la botanique, car cette plante est bisannuelle, alors que d'autres sont annuelles ou vivaces, rustiques ou pas.
Finale camphrée et collante.
Bien sûr, dans la très grande majorité des jardins du Jardin botanique, il est interdit de cueillir les feuilles des plantes. Toutefois, une plante dans la Cour offre tellement de feuilles aux visiteurs, que certaines utilisations en valent la peine. 2001. Martin me tendit une feuille d'Eucalyptus globulus: «Chiffonne cette feuille, puis remarque la texture et l'odeur…» Elle était et est encore aujourd'hui très collante et camphrée… Un petit voyage en Australie. Aaaahhhh!
Et encore? Encore plein de sens? Oui.
Une section se prête au goût d'intenses saveurs, alors qu'un meuble permet de jouer des instruments végétaux de musique. Pour une expérience encore plus complète, venez nous rencontrer ce week-end où le public pourra se mettre dans la peau d'un non-voyant et/ou assister à une causerie d'Isabelle Michaud, créatrice de parfums. La Cour des sens est située en face du restaurant du Jardin botanique de Montréal… Un chien de Carex se trouve devant. Aux plaisirs!