- 23 Mai 2019 - Planétarium Rio Tinto Alcan : Actualités astronomiques
Le 10 avril 2019, une équipe internationale d’astronomes dévoilaient en grande pompe la toute première photographie d’un trou noir. Retour sur cet exploit historique.
Un trou noir est un astre dont la matière le constituant est tellement comprimée, que même la lumière ne peut s’en échapper si elle s’en approche de trop près. Il déforme l’espace-temps et surchauffe toute matière située à proximité. Les astronomes avaient prédit l’existence de ces objets avec la théorie de la relativité générale d’Einstein il y plus de 100 ans.
Un télescope de la taille de la Terre
Malheureusement, il est extrêmement difficile d’observer directement un trou noir. Pour ce faire, cela nécessite un télescope ayant une très grande résolution. C’est ainsi que plus de 200 astronomes provenant de 20 pays différents ont conjugué leurs efforts dans le projet du Event Horizon Telescope (EHT). Ce projet regroupe 8 radiotélescopes répartis sur toute la surface du globe terrestre. Une fois reliés ensemble, cela permet de constituer un télescope virtuel de la taille de la Terre. La résolution du télescope EHT est de 20 microsecondes d’arc. Avec une telle résolution, une personne vivant à Montréal pourrait lire la date sur une pièce de 25 cents située à Vancouver.
Les astronomes ont aussi utilisé des horloges atomiques pour enregistrer l’instant précis de leurs observations dans le but d’en assurer une synchronisation quasi parfaite.
Après des années de tests et de calibrations, les équipes d’astronomes ont obtenu 4 jours d’observations en avril 2017 où toutes les conditions optimales étaient réunies.
Les données recueillies, soit près de 5 pétaoctets (5 millions de gigaoctets), furent stockées sur des disques durs et transférés par avion à deux supercalculateurs situés en Allemagne et aux États-Unis. Ensuite, elles ont été synchronisées au millionième de millionième de seconde près ! Cela a demandé près de deux ans de travail acharné.
Une image fascinante
L’image obtenue, qu’on peut voir plus haut, est tout à fait saisissante. Le gaz, en tombant vers le trou noir, se met d’abord à tournoyer rapidement autour et forme un anneau qui émet de la lumière. Lorsque les photons de lumière franchissent une région appelée l’horizon des événements, ils sont inexorablement capturés par le trou noir et créent une zone sombre au centre de l’anneau. Certains photons parviennent cependant à s’échapper, nous permettant d’observer un grand anneau.
L’image révèle l’existence d’un trou noir au centre de la galaxie massive M87, située à 55 millions d’années-lumière de la Terre. Le diamètre du trou noir avoisine les 40 milliards de kilomètres pour une masse équivalente à 6,5 milliards de fois celle du Soleil.
La matière dans l’anneau tourne dans le sens horaire. La zone plus brillante dans le bas de l’anneau correspond à de la matière s’approchant de nous, alors que la région sombre dans le haut représente de la matière qui s’éloigne.
L’image recueillie par l’EHT s’accorde de façon admirable avec les modèles théoriques des astronomes. Ce qui confirme la validité des résultats obtenus.
Dans le futur, les astronomes espèrent mieux comprendre comment se comporte la matière près d’un trou noir. Ils veulent aussi comprendre le rôle du champ magnétique dans les processus d’accrétion de matière et comment une galaxie comme M87 émet d’immenses jets de matière.
Mais surtout, la communauté des astronomes est impatiente de voir la seconde image de l’EHT, prévue pour la fin de l’année, celle du trou noir trônant au centre de notre Voie lactée. Celui-ci étant beaucoup plus petit que celui de M87, la matière tourne beaucoup plus vite dans l’anneau. Il faut donc s’attendre à une image différente et probablement plus complexe. Une histoire à suivre…