Les nuits encore longues et peu humides de février offrent généralement un ciel favorable aux observateurs et observatrices qui savent se protéger du froid. Ce sera l’occasion de contempler deux planètes le soir, deux autres le matin… avec en prime une 29ème nuit en cette année bissextile.
Saturne tire sa révérence
Le mois de février s’ouvre avec la dernière opportunité d’observer Saturne, la planète aux anneaux, avant qu’elle ne soit indétectable dans les derniers rayons du Soleil dès le deuxième tiers du mois. Guettez-la 30 à 45 minutes après le coucher du Soleil sous la forme d’un point de lumière plutôt timide au-dessus de l’horizon ouest-sud-ouest. Heureusement, Saturne trône dans la constellation du Verseau, où aucune étoile brillante ne lui fait concurrence. Si les conditions s’y prêtent bien, essayez de la voir en conjonction avec un très fin croissant lunaire qui reposera 3 ½ degrés en dessous, le 10 février au crépuscule. Il s’agit d’une observation difficile à entreprendre, 30 minutes après le coucher du Soleil au-dessus d’un horizon ouest-sud-ouest parfaitement dégagé.
Jupiter, un phare dans la nuit
Jupiter, quant à elle, sera beaucoup plus facile à observer tout au long du mois; il s’agit de l’astre le plus brillant du ciel de soirée (hormis la Lune bien entendu). Au début du mois, la planète géante apparaît à plus de 50 degrés de hauteur au sud dès le crépuscule et ne se couche pas avant minuit. De soir en soir, on remarque qu’elle est de plus en plus basse à l’ouest, mais elle se trouve encore à plus de 40 degrés au-dessus de l’horizon à la fin du mois, et elle se couche alors vers 23 heures. Le 14 février au coucher du Soleil, la Lune croissante repose 5 degrés à droite de Jupiter; au cours de la soirée, la Lune cheminera sur son orbite ce qui réduira l’écart à moins de 3 ½ degrés alors que les deux astres se couchent.
Vénus passe le relais à Mars
Les observateurs et observatrices du matin auront pris l’habitude de voir la brillante Vénus trôner au-dessus de l’horizon sud-est depuis de nombreuses semaines. Ce mois-ci cependant, sa progression vers la conjonction supérieure fait en sorte que son écart avec le Soleil se referme : elle s’élève donc moins haut au-dessus de l’horizon, et elle peine de plus en plus à s’extirper des lueurs de l’aube. Mars, au contraire, s’écarte de l’astre du jour et on assiste ainsi au début de la longue période qui nous sépare de son opposition de janvier 2025. Mars s’élève de plus en plus haut chaque matin, et son éclat devient assez distinct pour qu’on identifie en fin de mois sa couleur orangée caractéristique. Afin de repérer plus facilement Mars, deux occasions s’offrent à vous : le 7 février à l’aube, la très mince Lune décroissante repose 7 ½ degrés en bas et à droite de Vénus, tandis que Mars complètera un triangle formé par les trois astres, 7 degrés en bas et à gauche de Vénus. La seconde opportunité survient lors de la conjonction entre Vénus et Mars le matin des 21, 22 et 23 février, alors que moins d’un degré sépare les deux astres. Dans les deux cas, l’observation doit se faire environ 30 minutes avant le lever du Soleil, au-dessus d’un horizon sud-est parfaitement dégagé.
Occultation de Bêta Virginis
Le matin du 26 février, la Lune tout juste passée pleine éclipsera l’étoile de faible magnitude Bêta Virginis (mag. +3,6)—un phénomène appelé occultation. Bien que l’évènement se produise à une hauteur confortable dans le ciel, une trentaine de degrés au-dessus de l’horizon sud-ouest, l’observation nécessite au moins un petit télescope en raison de l’éclat de la Lune, très intense par rapport à celui de l’étoile. Depuis Montréal, Bêta Virginis disparaît derrière le bord éclairé de la Lune à 4 h 28 min 11 s, heure normale de l’Est; l’étoile réapparaît derrière le bord sombre de notre satellite moins d’une heure plus tard, à 5 h 22 min 37 s.
Une journée de plus en 2024
En cette année bissextile, le mois de février comptera un 29ème jour. On apprend à l’école que la Terre effectue une révolution autour du Soleil non pas en 365 jours, mais en 365 ¼ jours. Dès l’époque de Jules César, on a compris qu’un ajustement était nécessaire pour compenser ce quart de journée supplémentaire que la Terre prend pour compléter son orbite, si bien qu’on ajoute une 366ème journée à notre calendrier depuis cette époque, et ce tous les 4 ans…
… en fait, pas tout à fait tous les 4 ans. D’abord, il faut comprendre que l’année de 365,25 jours n’est qu’une grossière approximation. D’autre part, on souhaite aussi que le calendrier demeure en phase avec les saisons, pour ne pas éventuellement se retrouver à vivre le plein été de décembre à mars ! Pour cela, le calendrier doit reproduire ce qu’on appelle l’année tropique, dont la durée précise est de 365,242189 jours.
Si on s’en tient strictement à la règle julienne, qui ajoute systématiquement une journée à tous les 4 ans, un décalage apparaît rapidement entre le calendrier et les saisons : 1 jour entier par 128 ans, soit 15 jours en 2000 ans. Il y a tout simplement trop de « 29 février » dans le calendrier julien ! En vigueur depuis 1582, notre calendrier grégorien corrige ce surplus en retirant quelques-uns de ces 29 février excédentaires selon des règles assez simples.
Comme le calendrier julien avant lui, il prévoit une année bissextile tous les 4 ans, mais il omet la journée supplémentaire les années qui se terminent par deux zéros et qui ne sont pas des multiples de 400 (1700, 1800, 1900, 2100, etc.). C’est suffisant pour rétablir une excellente correspondance entre année grégorienne et année tropique : ainsi, il n’apparaît un décalage d’une journée qu’au bout de 3200 ans. On pourrait encore améliorer la correspondance à très long terme en omettant un 29 février les années qui sont des multiples de 4000 (l’an 4000, 8000, 12000, etc.).
Certains et certaines d’entre vous vivront assurément la prochaine « exception à la règle des 4 ans » puisqu’elle aura lieu dans seulement 76 ans, en l’an 2100.
Bonnes observations !