C'est entre autres par des excursions d'herborisation dans les milieux naturels qu'un jardin botanique obtient certaines de ses plantes les plus intéressantes.
Ces récoltes ont des objectifs de recherche, de conservation ou d'éducation. Elles doivent se faire dans le respect des lois et règlements nationaux et internationaux en vigueur. Mentionnons, à titre d'exemples, les lois sur les espèces menacées et les règlements phytosanitaires des différents pays, la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), la Convention sur la diversité biologique, etc. Ces nombreux règlements visent principalement à protéger les ressources biologiques mondiales afin d'en assurer la pérennité.
Pourquoi les plantes issues du milieu naturel sont-elles si importantes?
- Les espèces varient sur l'ensemble de leur aire de répartition. Connaître l'origine exacte du matériel étudié est donc primordial pour plusieurs types de recherches scientifiques.
- Cette même variabilité génétique doit être bien représentée dans tout programme de conservation ex situ (culture de plantes sauvages hors de leur milieu naturel) d'espèces menacées. On doit donc connaître les provenances afin d'évaluer si cette variabilité est bien préservée dans le matériel cultivé.
- L'intégrité de matériel d'origine cultivée peut avoir été compromise avec le temps, notamment en raison d'erreurs d'étiquetage ou d'une multiplication inappropriée (risque d'hybridation par semis, par exemple). Le matériel provenant directement du milieu naturel conserve son intégrité.
Les excursions de récoltes en pays exotiques
Même si l'époque des grands explorateurs est révolue, l'exploration botanique demeure encore une activité très importante. En effet, à l'heure où les habitats naturels disparaissent à un rythme effréné, il devient urgent de répertorier à travers la planète les sites les plus riches et les plus diversifiés afin de les conserver.
Plusieurs flores, particulièrement en zones tropicales, sont encore relativement méconnues et tardent à être inventoriées. De plus, cet immense bassin de biodiversité regorge de ressources génétiques et biochimiques essentielles à une multitude d'activités scientifiques, allant de l'amélioration des espèces cultivées en agriculture à la découverte de nouveaux médicaments.
Voici quelques exemples d'excursions en pays exotiques réalisées par des botanistes du Jardin :
- De 1939 à 1944, le frère Marie-Victorin a exploré Cuba en compagnie du frère Léon, un ami botaniste en mission dans la région. Ces explorations ont permis à Marie-Victorin d'intégrer plus de 500 plantes et plus de 3000 planches d'herbier dans les collections du Jardin et de l'Institut botanique de l'Université de Montréal. Elles ont également mené à la publication de divers ouvrages, dont les Itinéraires botaniques dans l'île de Cuba rédigés par les frères Marie-Victorin et Léon ainsi que la Flore de Cuba publiée par le frère Léon en collaboration avec le frère Alain.
- Henry Teuscher, premier conservateur du Jardin, a pour sa part joué un rôle majeur dans l'essor de la collection d'orchidées dans les années 1950 à 1970, et ce grâce à ses propres explorations en Amérique du Sud ainsi qu'à celles de ses collaborateurs, C. Horich au Costa Rica et J. Strobel en Équateur. L'étude des spécimens rapportés a permis la rédaction de nombreux articles qui ont contribué à la renommée du Jardin et d’Henry Teuscher dans le monde des orchidées.
- Grâce au botaniste Denis Barabé, le Jardin possède une imposante collection d'Aracées issues du milieu naturel. De 1984 à 2008, plus de 450 plantes originaires d'Afrique et de Guyane française ont été mises en culture dans les serres du Jardin. Ces spécimens ont servi à de nombreuses recherches fondamentales sur cette famille, notamment à l'étude de l'évolution des caractères floraux et de la thermogenèse (production de chaleur) par les inflorescences.
Texte adapté de l'article de Denis Barabé et Édith Morin, magazine Quatre-Temps, vol. 17, no. 1.