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Ép. 4 : Opérer les systèmes de support à la vie

Français

L’opérateur électromécanique veille au bon fonctionnement des systèmes qui soutiennent la vie dans les écosystèmes du Biodôme. Découvrez un autre métier méconnu du Biodôme.

Jonathan Lorrain est opérateur électromécanique au Biodôme. Son travail consiste à s’assurer que tous les systèmes fonctionnent bien dans les coulisses. Maintenir le bon niveau de salinité de l’eau dans le bassin du Golfe du Saint-Laurent ou la bonne température dans l’Érablière des Laurentides. S’assurer que la luminosité dans l’habitat des manchots correspond à la bonne saison ou remplir un bassin fraîchement nettoyé. En sommes, il veille à ce que les conditions de vie soient adéquates pour la flore et la faune du Biodôme. Ce que fait naturellement mère Nature, au Biodôme, c’est l’opérateur électromécanique qui s'en charge!

Transcription

Jonathan Laurin - Un opérateur, en moyenne dans sa journée de travail, va parcourir à peu près 15 km pour opérer à travers les quatre écosystèmes. C'est pas si pire 15 km pour faire le tour du monde.

  Musique

Jonathan Laurin - Bonjour, je m'appelle Jonathan Laurin , je suis opérateur électromécanique au Biodôme de Montréal depuis 15 ans. L'opérateur, c'est lui qui veille sur tous les écosystèmes, température, l'eau, la ventilation, l'éclairage.

Il est 6 h, j'arrive. Sur ma cédule je sais que j'ai une plongée aux castors qui va se faire. Les plongeurs vont descendre, alors ça va me prendre beaucoup d'eau en forêt laurentienne. Je vais avoir à vider quelques bassins à la tropicale, puis m'assurer que les niveaux sont bons. J'ai le monde polaire aussi, la machine à neige à partir pour faire un bon couvert de neige pour les manchots. Pour la suite, ça va être des imprévus.

  Musique

Jonathan Laurin - J'ai le rôle de Mère Nature. Si je veux que mes locataires soient bien, il faut que je m'assure que tous mes paramètres respectent la fourchette de leur bien-être. J'ai une planche avec les températures, l'humidité, la ventilation, l'éclairage, parfaite pour que la croissance de tous les animaux qui habitent dans un des écosystèmes soit optimale.

  Musique

Jonathan Laurin - Dans notre journée, l'importance de la tournée est primordiale. On a des paramètres sur notre ordinateur qui nous donnent le changement d'état à la seconde près. On s’est gardé un côté un peu visuel et un côté manuel au travail d'opérateur. Ça nous implique à aller sur les lieux physiques, de vérifier nos vannes, l'état des pompes, le bruit aussi. Si une sonde peut te dire si le moteur chauffe, tu vas avoir des fois un bruit. On reconnaît le bruit de nos machines, on reconnaît quand ça va bien puis l'aspect visuel de nos salles mécaniques. S’il y a moindrement quelque chose qui a changé, on le voit.

  Bruits de machinerie

Jonathan Laurin - Là, on est dans le troisième sous-sol au Biodôme, on est sous le lac des castors. J'ai mes moteurs de pont. Ça, c'est mes trois filtres pour le bassin des castors : filtre à sable multicouches, j'ai ma tour d’ozone pour la désinfection de l'eau, j'ai mon réservoir d'eau douce qui est ici présentement. 250 000 litres d'eau douce à température qu'on l'a du réservoir, donc à 4 degrés, on peut l'envoyer au Saint-Laurent ou l'envoyer à tropicale à 29 27 degrés, et on peut modifier à l'ordinateur les températures qu'on a besoin.

Radio - À l'opérateur.

Jonathan Laurin - À l'écoute Jacques.

Radio - J'aurais besoin de remplir le rio.

Jonathan Laurin - Oui, t'as besoin de l'eau à combien?

Radio - 28 s’il-te-plaît. Et idéalement, il faudrait faire les lavages après la pause.

Jonathan Laurin - 10-4. Ok, donc après la pause, les lavages. Oui ok je te le mets en transfert. Ça devrait prendre quelques minutes avant que tu aies de l'eau.

Radio - Merci.

Jonathan Laurin - Là, ça c’est un imprévu. Il s'est aperçu que son niveau de bassin ne se rend pas aux écumoires, il veut le faire ajuster, donc il m'a demandé d'y transférer de l'eau à 28 degrés pour le rio. On retourne à l'ordinateur. Ma circulation est arrêtée, tout est prêt pour les plongeurs, donc eux autres vont pouvoir commencer à s'installer. Après on va monter voir comment ça va de leur côté.

  Musique

Jonathan Laurin - On va se diriger vers la forêt laurentienne pour regarder l'opération de plongée, si tout va bien et si on a besoin de faire des changements sur la planification de ce qu'on a fait au sous-sol.

On embarque dans le monte-charge, on va aller au deuxième étage, au niveau des visiteurs, pour voir le bassin des castors.

Notre chimiste à l'interne prend des analyses et regarde le niveau d'alcalinité de la zone tampon du Saint-Laurent. Quand on fait un changement d'eau, l'alcalinité et la zone tampon de cette alcalinité baissent, donc ça peut affecter le PH. Donc nous, il faut corriger avec des poches de bicarbonate de soude.

  Musique

Jonathan Laurin - Ici, vous pouvez voir, c'est les anciens estrades du Vélodrome. Ça sert de zone de séchage pour les végétaux, pour nos horticulteurs.

Jonathan Laurin - (À la radio) Opérateur à l'écoute.

Radio - On va pouvoir remplir les ibis. Merci.

Jonathan Laurin - 10-4. Là, j'ai eu Roxan qui vient de m'appeler. Ils ont fini de nettoyer un des bassins à la tropicale, elle va vouloir que je remplisse. Mais c'est pas un bassin à haut débit, je vais pouvoir lui ouvrir la vanne même si Jacques est en train de remettre son niveau du rio à la bonne hauteur. Ça ne perturbera pas mes opérations, donc je vais pouvoir lui donner en même temps.

On peut voir que le plongeur est dans l'eau. Son tuyau amène vers l'écumoir, toute l'eau qu'il va aspirer va aller directement dans l'écumoir. Ça, c'est les vannes que j'ai ouvert, et en arrêtant la circulation il ne sera pas perturbé dans son mouvement non plus. Ça va faciliter son travail et ça réduit au moins les dangers.

Pour le bassin des castors, les étapes quand le technicien en plongée m'appelle et me dit que la plongée va débuter dans quelques instants, il me donne toujours un jeu d'une dizaine de minutes pour que j'aie le temps de préparer mon système. Chacune de mes pompes qui alimentent mes trois filtres, je l'arrête progressivement puis je ferme la vanne d'appoint qui amène l'eau jusqu'à ma pompe. Ensuite, je ferme la succion de fond de mes pompes, j'ouvre mon drain qui amène à la vidange, comme ça j'évite que, même si j'ai ouvert mon drain, je ne vide pas mon bassin des castors.

Je vois que la circulation est bonne, j'ai vu que les succions de fond ne sont pas bloquées par les feuilles puis qu’il y a un bel écoulement. Donc ça c'est parfait. Tout est beau, on peut aller transférer l’eau à tropicale pour Roxan.

  Musique

Jonathan Laurin - On va pouvoir prendre le monte-charge et descendre à la salle mécanique du Saint-Laurent marin.

  Bruits de monte-charge

Jonathan Laurin - La première chose pour l'opérateur qui vient, c'est de se retrouver. On lui donne un trousseau de clés, et ça prend d'habitude un mois pour qu'il trouve les trucs pour que ses tournées ne prennent pas deux heures.

  Bruits de monte-charge

Jonathan Laurin - C'est fait ovale, ce n'est pas une bâtisse carrée, donc ça reste que tu n’as pas les mêmes réflexes. Ici on est dans la salle mécanique du Saint-Laurent marin. On s'en va regarder tous nos items et on se rend jusqu'à la vanne pour le bassin de Roxan, pour le méandre des ibis.

Quand on a notre appel et qu'on est en train de faire notre opération qui est cédulée sur celle des castors, on est amené aussi à faire notre tournée. Ensuite, je suis allé voir les plongeurs si tout allait bien, puis j'ai fini par faire un petit détour vers la tropicale et je me suis aperçu que le bassin des caïmans était un peu bas et écumait mal. En descendant, je savais que j'étais déjà en eau chaude parce que une des TSA m'avait appelé pour remplir le bassin des ibis et c'est pas un bassin qui consomme beaucoup d'eau. Donc j'ai pu me diriger vers le bassin des caïmans et rajouter de l'eau, le temps que les plongeurs finissent. Quand les plongeurs ont fini, j'ai juste eu besoin de faire mon transfert d'eau chaude à eau froide. J'ai pu remplir le bassin des castors.

Je me rends finalement à ma vanne et il va falloir que je me mette à l'esprit que ça prend à peu près une heure remplir avant que le réservoir de ce bassin-là soit plein.

  Bruits de machinerie

Jonathan Laurin - Très petites vannes à très petit débit, c’est pour ça que c'est long. C'est vraiment juste un petit ruisseau où ils nourrissent les ibis et les spatules. Ils mettent du krill dedans, il ne faut pas que ce soit haut, il faut quand même que l'eau soit chaude.

  Musique

Jonathan Laurin - Au niveau de mon caïman, il manque deux pouces d'eau à peu près. Il va falloir que quand je vais avoir fini de remplir les ibis, j'ouvre une vanne et que je corrige le niveau. Si vous pouvez voir aussi, chaque grand arbre, c'est des faux arbres. Ça tient la structure, mais en même temps, c'est nos dogues de ventilation. Je vois les feuilles qui dansent un peu, ça veut dire que ma ventilation est bonne.

  Musique

Jonathan Laurin - Je ferme la vanne pour le méandre des ibis. Ça fait le temps que j'avais calculé à peu près, un peu en bas d'une heure. Le niveau va être parfait, puis j'irais vérifier après.

Jonathan Laurin - On quitte la tropicale et on va aller vers le monde polaire. Juste pour vivre un bon contraste.

  Musique

Jonathan Laurin - Tu aiguises tes sens en sachant que tu ne peux pas juste te fier sur tes machines.

Au début du Biodôme, tout était automatisé et il est arrivé des problèmes. Il y a des bassins qui se vidaient, une perte de contrôle. À l'époque, la mentalité des gestionnaires avait dit on va garder les opérateurs 50% manuel pour qu'ils gardent quand même toujours le réflexe de se rendre sur place, de connaître leur système, les vannes et tout ça parce que si c'est juste un contrôle informatique, ils vont perdre le contact avec le terrain. Ça nous pousse à bouger, à regarder et, en se déplaçant, on peut constater un problème qu'on n'aurait pas vu. On a beau avoir des sondes sur tout, ce n'est pas tous les paramètres qui peuvent être notés et des fois, on peut arriver même avant la sonde à détecter quelque chose.

Des fois c'est ça, le Biodôme c'est s'adapter aux nouveaux désirs ou besoins des collections. C'est toujours comme une danse à deux avec les collections et les services techniques.

  Musique

Jonathan Laurin - Les opérateurs doivent être sur les lieux sept jours sur sept, 24 sur 24. Parce que l'opérateur pourrait être chez eux avec un cellulaire et s’il y a une alarme, il rentrerait. Sauf que la réalité d'aujourd'hui, c'est que la plupart des gens restent en banlieue. Peu de monde reste à cinq minutes de son travail. Nous autres on regarde la sécurité mécanique des lieux, ça ne veut pas dire que quand le monde est parti et qu’il n’y a pas de visiteur, les animaux arrêtent de vivre. Eux autres ils sont là tout le temps, j'ai mes locataires à surveiller et à m'occuper. Il y a des cycles de nuit, il faut que la lumière se ferme, la température suive, la ventilation. Le Biodôme n’arrête jamais. Nous on est en représentation tout le temps. On travaille derrière le décor.

Je vais en profiter pour aller fermer ma vanne aux caïmans parce que si je l'oublie et je repars en eau chaude, je vais me demander pourquoi je n'ai pas de pression pour mes autres bassins, et mes caïmans vont se retrouver loin sur la plage. Ils vont peut-être avoir assez d'eau pour manger les tamarins. On va éviter ça.

On retourne au bassin des castors, car le niveau, on l'a vu à l'ordinateur, on est arrivé à 84 pouces. Oui c'est ça. Je vais fermer la vanne à chaîne, arrêter mon transfert d'eau froide et je vais pouvoir avertir la technicienne en soins animaliers qu'elle peut libérer les castors. Je mets mon sélecteur en ajustement, je ferme ma vanne à chaîne. Et avant même de repartir la circulation, parce que ma circulation il faut vraiment que je la reparte lentement pour ne pas caper l'air, elle va pouvoir quand même libérer les castors avant. (À la radio.) Opérateur à TSA de la Laurentienne, juste vous dire j'ai fini de remplir aux castors, vous pouvez libérer les bêtes.

Radio - 10-4, merci beaucoup.

  Musique

Jonathan Laurin - Ça devient tellement large qu'un moment donné ça pourrait donner le vertige. Mais on dirait que tu prends une bouchée à la fois et tu ne t'en rends pas compte mais dans ta journée, quand tu as fini, tu dors bien.

Pour moi ma motivation, mon travail, et qui fait en sorte que tous les matins que je rentre, ou les soirs, je suis content et je suis motivé, c'est la mission je pense de l'organisation. Ça fait 15 ans et je suis toujours aussi content de rentrer. De savoir qu’on préserve un côté naturel, surtout dans nos temps aujourd'hui, où la nature souffre tellement. Ça va être comme un polaroïd ou quelque chose qu'on a préservé pour expliquer la fragilité. Nous, ça nous prend des milliers de machines, des milliers de sensors pour réussir à ce que fait la nature de façon simple, qu'on est en train de tout dérégler, et nous autres on n'arrive même pas à sa cheville avec tout l'investissement qu'on fait. Aussi on s'attache à nos locataires, les paresseux, les poissons, les oiseaux, on ne veut pas qu'il leur arrive rien. On est les porteurs de flambeau de ceux qui nous ont précédés. On arrive à nos 30 ans, donc plusieurs de nos collègues qui quittent, mais ils nous ont laissé un héritage qu'on essaie de préserver. Peu de personnes peuvent dire qu'il y a une forêt tropicale et un monde arctique sous le même toit.


Ce balado est une production d’Espace pour la vie, un service de la Ville de Montréal.

Avec la participation de Jonathan Laurin, Opérateur et de l’équipe du Biodôme.

    • Réalisation : Amarilys Proulx et Marine Fleury
    • Recherche et scénarisation : Amarilys Proulx
    • Recherche musicale : Marine Fleury
    • Prise de son : Antonin Wyss
    • Montage et mixage : Mériol Lehmann

Espace pour la vie, le plus important complexe en sciences de la nature au Canada, a pour mission de rapprocher l’humain de la nature et de favoriser une prise de conscience sur la nécessité de s’engager dans sa protection.