Les 8 juin 2004 et 5 juin 2012, la planète Vénus est passée exactement entre le Soleil et la Terre. Pendant quelques heures, Vénus est apparue en silhouette devant la surface de notre étoile. On a alors pu l’observer avec des équipements optiques ou une image du Soleil projetée sur un écran. Ce phénomène n’avait pas été visible au Québec, ni ailleurs sur Terre, depuis plus d’un siècle.
Explication d’un phénomène rarissime
Un passage de Vénus ne se reproduira pas avant le 11 décembre 2117. Voici pourquoi ce phénomène a lieu si rarement.
La planète Vénus est la seconde dans l'ordre de distance à partir du Soleil. Elle circule donc sur une orbite plus petite que celle de la Terre. Alors que la Terre boucle une révolution autour du Soleil en un an, Vénus ne met que 225 jours pour compléter la sienne.
À tous les 584 jours en moyenne, Vénus repasse entre le Soleil et la Terre. Ce moment s’appelle la conjonction inférieure. En général, la planète passe alors largement au-dessus ou en-dessous du Soleil parce que son orbite est inclinée de 3,4° par rapport à celle de la Terre. Mais, en de rares occasions, lorsque la conjonction inférieure survient au début de juin ou de décembre, l’alignement est tel que Vénus glisse directement devant le disque du Soleil. On appelle ce phénomène un passage. L’usage du terme transit est un anglicisme dans ce contexte.
Généralement, deux passages de Vénus se produisent à huit ans d’intervalle. Chaque paire est cependant séparée de la suivante de 105 et demi ou 121 ans et demi, en alternance. Ainsi, les récents passages de juin 2004 et de juin 2012 font partie d'une telle paire. Le précédent passage de Vénus s’était produit le 9 décembre 1882, 105 ans et demi auparavant.
Les premières prédictions du passage de Vénus
Le célèbre astronome Johannes Kepler a effectué les premières prédictions de passage de Vénus. Le passage de 1631 n'était pas visible depuis l'Europe et n'a vraisemblablement pas été observé. Curieusement, les calculs encore grossiers de Kepler montraient qu'il n'y aurait pas de passage en 1639.
Bien servi par son intuition, l'astronome anglais Jeremiah Horrocks refit les calculs de Kepler. Complétés moins d'un mois avant la date fatidique, ceux-ci montraient qu'un passage de Vénus aurait bel et bien lieu le 4 décembre 1639. Mais le délai était trop court à l'époque pour que l'information puisse être acheminée aux astronomes européens. Horrocks et son ami William Crabtree ont donc été les seuls témoins de ce premier passage de Vénus, jamais observé auparavant.
Déduire la distance entre les planètes
En 1677, l'astronome Edmund Halley (célèbre pour avoir eu l'intuition que certaines comètes sont périodiques et pour avoir correctement prédit le retour de l'une d'elles) comprit qu'un passage de Vénus pourrait permettre d'établir la distance absolue qui sépare la Terre du Soleil. Pour y arriver, il faudrait combiner des observations prises d'endroits géographiquement aussi éloignés que possible les uns des autres. Une fois cette mesure connue, on pourrait ensuite déduire la distance de toutes les autres planètes du système solaire, et même celle des étoiles les plus proches. Ce phénomène revêtait donc une importance fondamentale pour les scientifiques de l’époque.
Ainsi, aux 18e et 19e siècles, de nombreuses expéditions ont été menées aux quatre coins du monde pour observer les quatre passages de Vénus (1761, 1769, 1874 et 1882). Des astronomes ont mesuré aussi précisément que possible le moment où la petite silhouette ronde de Vénus entre et sort devant le disque du Soleil. Pour une foule de raisons, il s'est avéré très difficile de mesurer avec la précision souhaitée le moment exact des contacts. Malgré ces quelques déceptions, les astronomes de l'époque ont tout de même pu établir l'ordre de grandeur des distances dans notre système solaire.
Aujourd’hui, on mesure la distance de la Terre aux planètes avec une très grande précision (de l'ordre du mètre) grâce notamment aux échos radar. L'intérêt des passages de Vénus tient donc surtout à leur rareté et aux événements historiques qu'ils rappellent. Phénomène autrefois réservé aux scientifiques et chercheurs, les passages de 2004 et de 2012 ont été les premiers qui aient connu une large diffusion auprès de la population et que le grand public a eu le loisir d'observer.
Qu’en est-il des passages de Mercure?
Située encore plus près du Soleil, la planète Mercure passe fréquemment devant notre étoile : environ 13 fois par siècle! Mais Mercure est plus petite que Vénus et plus éloignée de nous. Elle nous apparaît donc trop petite lors de ses passages pour servir à mesurer la distance Terre-Soleil...
Passages de Vénus (temps universel)
- 7 décembre 1631
- 4 décembre 1639
- 6 juin 1761
- 3 juin 1769
- 9 décembre 1874
- 6 décembre 1882
- 8 juin 2004
- 6 juin 2012 (5 juin dans les Amériques)
- 11 décembre 2117
- 8 décembre 2125
* La date à laquelle le phénomène s’est produit a varié selon le fuseau horaire du lieu d'observation.
Pour en savoir plus
- Webcams du site VENUS2004.org (en anglais)
- Retransmission d'Athènes sur le site Exploratorium (en anglais)
- Transit of Venus dot org (en anglais seulement)
- Predictions for the 2012 Transit of Venus (site de Fred Espenak, NASA/GSFC) (en anglais seulement)
- Le « film » du passage de Vénus de 1882 (Sky & Telescope) (en anglais seulement)
- Le passage de Vénus retransmis en direct sur le site de la NASA (en provenance d'Hawaï) (en anglais seulement)